Aramis | Jeunesse lève-toi.

Ce matin, je me suis levée de bonne heure, de très bonne heure même, pour immortaliser le lever du jour. Je suis allée vers le phare de Biarritz. Ce phare qui s’illumine petit à petit avec le levé du soleil, rien de plus beau, je vous l’assure. Je suis restée assise dans l’herbe, à regarder cet horizon. Que je suis heureuse de pouvoir vivre de ma passion. Je n’ai pas vu le temps passé. Quand je regarde ma montre, il est plus de dix heures. J’étais perdue dans mon petit monde. Le monde où rien d’autre ne compte que cette beauté naturelle, cette immensité envoutante. Au fond, ce n’est pas compliqué la vie dans mon petit monde. Je me lève joyeusement, et prend une dernière photo avant de rentrer chez moi. Maintenant qu’il y a du monde dans les rues, c’est quand même mieux de prendre une douche et de porter autre chose qu’un jogging.

Une fois propre, j’enfile un short avec un petit débardeur. Il fait tellement chaud. Non, il fait plutôt lourd en fait. J’ai horreur de ce temps. Je n’aime pas la chaleur. J’ai toujours préféré le froid. Et là vient la question : pourquoi être venue à Biarritz ? Je pense que cette question restera éternellement sans réponse. C’est ce qui est drôle, dans la vie : ne pas donner de sens à tout ce qu’on fait, tout ce qu’on peut faire, tout ce qu’on veut faire. Je tourne une fois dans mon appartement, avant de ressortir avec mon appareil photo et mon sac. Je claque la porte, en sautillant et en souriant.

Je retourne vers la plage. Il fait beau. Le soleil brille. Il n’y a presque aucun nuage. Du coup, je prends mon téléphone pour envoyer un message à Aramis. RDV à la plage dans dix minutes, je t’attends déjà. J’ai envie de passer le reste de cette journée avec lui. Et s’il fait si beau tout l’après midi, je sens que je ne vais pas résister à la tentation d’aller marcher dans l’eau. De toute façon, je sais qu’il va venir. Parce que, s’il ne vient pas, j’irais le chercher. Peu importe le temps que ça me prendra. Je sais qu’il a besoin de prendre l’air. Il a juste du mal à trouver l’envie. Mais moi, j’ai toujours la motivation pour deux. Je m’assois dans le sable. Je regarde les quelques –enfin ça dépend ce qu’on entend par «quelques » – photos que j’ai prises ce matin. Je suis plutôt contente du résultat. Comme quoi, ce n’est pas toujours mauvais de se lever aux aurores.

Je sursaute. Je ne l’ai pas entendu arriver. Ni un bonjour, ni rien d’autre. Il commence par râler, comme à chaque fois. Je souris. Je continue de passer les photos pendant qu’il râle. Au fond, j’aime bien l’entendre ronchonner. Je m’y habitue. Il est comme ça. Je ne le changerais pas. Et puis, il peut râler mais sourire quand même, non ? j'comprendrais jamais comment tu peux kiffer prendre des photos de paysages. c'est tellement chiant, rien qu'à regarder... à moins que tu les revendes pour des cartes postales, mais c'est con, un peu, parce que elles sont moches les photos de carte postale. Du Aramis. Du grand Aramis ! « Je te remercie pour ce magnifique compliment mon beau. » Je pose mon appareil et me lève, pour serrer mon ami dans mes bras. Je suis comme ça. Je suis tactile. Je l’ai toujours été. Et puis, j’ai l’impression, j’ai l’espoir de lui transmettre toutes mes ondes positives en le serrant fort dans mes bras. « Je t’ai réveillé ? » Je lui souris, et je me rassois dans le sable. Je range mon appareil. J’ai souvent du mal à m’en séparer, mais c’est aussi important de profiter de ce qu’on a vraiment. En l’occurrence, je veux partager cette demi-journée avec lui. Il me fait comprendre, souvent, que je devrais lâcher prise, qu’il ne sera pas éternel. Je ne veux pas. Je refuse. Je veux être là pour lui. C’est mon ami. Il s’assoit à côté de moi. Je passe ma main sur son épaule, pour la poser dans son cou, et poser ma tête contre lui. « Tu pourrais quand même reconnaître que c’est un paysage magnifique ! » Un ami, du sable, de l’eau, l’horizon. Comme quoi, il ne faut pas grand-chose. Je redresse juste ma tête pour le regarder. En fait, j’ai envie de lui demander s’il va bien. Mais je me retiens. Parce que tout le monde lui monde sans arrêt. Enfin je pense. Je n’en sais rien. Je ne veux pas le rappeler à la réalité. Non, je veux juste le faire sourire. En plus, il a un sourire magnifique. Alors, je passe à autre chose. Je ne veux pas le braquer. Je veux lui changer les idées. « Je sens que je vais aller marcher dans l’eau, vu cette chaleur. » Je me lève. Je me mets devant lui et lui tends une main. « Tu accompagnerais une jeune demoiselle seule ? » Je laisse échapper un sourire. Je suis comme ça. Toujours souriante, toujours joyeuse, toujours de bonne humeur. De toute façon, je sais qu’il va craquer. S’il est venu jusqu’à la plage, c’est qu’il avait un minimum envie de me voir. Je le vois comme ça en tous cas. De façon positive, comme d’habitude.

Au fond, je ne sais pas pourquoi je lui ai demandé ça. Je savais très bien qu’il allait renvoyer bouler tout ça. Du moins, qu’il allait me dire ça. Il pense le contraire. Ca se sent. Sinon, il ne se serait pas donner la peine de venir jusqu’ici. J’aime le voir sourire. Et je ne me cache jamais de lui dire. « T’es tellement beau quand tu souris. » Je le regarde tendrement. On a beau être presque deux opposés, Aramis est l’une des personnes avec qui je préfère passer du temps. Moi, mon objectif, c’est de le faire sourire. Juste ça. Je sais qu’il ne sourit pas pour faire plaisir aux autres. Non, lui, quand il sourit, c’est avec toute sa sincérité.

Je me lève joyeusement. J’insiste pour qu’il me suive. Louane 1, Aramis 0 ! Je ris. « Pitié ? A ce point ? » J’attrape sa main et marche joyeusement vers l’eau. Il fait tellement beau, tellement chaud que ça nous fera le plus grand bien. Je me retourne pour marcher à reculons, face à lui. « J’adore quand tu fais mine d’en avoir rien à faire de tout. » Je ne peux pas m’empêcher de prendre des photos. Aramis, lui, il râle. Il n’aime pas que je le prenne en photo. Moi, je veux garder le souvenir de ces moments. Ces beaux moments qu’on passe ensemble.

On arrive enfin dans l’océan. Ce bel océan atlantique. Que j’aime marcher dans l’eau. Je pourrais y passer des heures ! J’en profite pour prendre quelques surfeurs en photos. Quand je les vois, je me dis que ça à l’air facile, d’affronter les vagues. Je n’ai encore jamais essayé. Je préfère les prendre en photo plutôt qu’être sur la planche. Enfin sur la planche, c’est bien enthousiaste. Telle que je me connais, je vais finir à l’eau plus d’une fois, et je vais boire la tasse un nombre incalculable de fois. Louane et sa maladresse, comme dirait mon père. Je reviens vers Aramis. J’aurais tendance à me perdre avec tout ce qui m’entoure. J’attrape son bras, avec enthousiasme. « Si tu ne reconnais pas qu’on est au paradis ici, je te jette à l’eau. » Je ris. C’est ridicule. Il doit avoir au minimum deux fois plus de force que moi. Je pense que j’aurais du mal, avec mes petits bras musclés, à le pousser dans l’eau. Je ne vais quand même pas partir pessimiste. Si ça se trouve, je trouverais un homme musclé pour m’aider. Un bel homme musclé, surfeur, avec l’accent du sud. Reviens sur terre Louane ! Je ris. Je suis bien, là. Cette journée est, jusqu’à maintenant, parfaite. Je suis heureuse, tout simplement. Peu de choses suffisent à mon bonheur. C’est comme ça que mon père m’a appris à vivre. Et je lui en suis reconnaissante, vraiment.

Je ris. C’est plus fort que moi. Sa nonchalance totalement fausse est impressionnante. C’est un bon comédien. Un très bon comédien. « Tu vas gagner un Oscar un de ces jours ! Jean Dujardin n’a qu’à bien se tenir. » Je ne cesse de rire en marchant vers l’océan, tenant la main d’Aramis. Depuis que je le connais, il est comme ça. Ce qu’il dit est souvent en totale contradiction avec ce qu’il pense. J’ai pris l’habitude de faire avec. Maintenant, je souris, et je sais ce qu’il pense. Il n’aime pas être pris en photo, ça j’en suis sûre. Je m’approche de lui, encore. Je ne cesse de sourire. « Tu peux encore essayer, tu ne gâcheras pas ma bonne humeur. » Je m’éloigne en souriant, jusqu’à sentir l’eau recouvrir mes pieds. Je ferme les yeux. J’inspire doucement. Que c’est agréable ! Il y a du monde autour et pourtant, j’ai l’impression d’être totalement, d’être totalement libre. C’est bizarre cette sensation. J’adore ! Je voudrais ressentir ça tous les jours.

J’admire les surfeurs. Il faut reconnaître qu’ils sont loin d’être désagréables à regarder. Et puis, j’ai toujours été fascinée par le surf, sans jamais oser affronter les vagues moi-même. J’aurais presque envie de me noyer pour qu’ils viennent me sauver. Non, il faut que j’arrête de penser à ça. Je les prends en photo. C’est ce que je sais faire. C’est ce que j’aime faire. J’entends Aramis me répondre. Je ris parce qu’au fond, on a pensé à la même chose. « Interdiction de mettre l’appareil photo à l’eau ! » J’opte pour un ton convaincant et convaincu. Pour le coup, je m’en fiche de finir à l’eau, du moment que mon petit bijou reste au sec. Je me retourne et le vois fier de lui. J’adore le voir comme ça. Je souris. Mes yeux pétillent. Je me rapproche de lui, pour l’emmener dans l’eau avec moi. Juste les pieds. Il a beau garder sa nonchalance, il me suit gentiment. C’est un vrai gentil ce mec. C’est ce que j’adore chez lui. « Range ton égo et reconnais que c’est magnifique ! » Je souris. Je le regarde. Puis, j’avance un peu plus dans l’eau. J’ai de l’eau jusqu’aux genoux. Je ris. Je me retourne vers Aramis pour le prendre de nouveau en photo. Je ne quitte pas mon appareil. C’est plus fort que moi, je crois. J’ai besoin de l’avoir dans les mains presque en permanence. C’est mon petit pêché mignon pourrait-on dire.

J’hésite. C’est rare que ça m’arrive. J’ai envie de l’arroser, de lui jeter de l’eau en plein visage. Il va me noyer si je fais ça. Je me ravise. Ce n’est pas le cas des deux enfants qui arrivent près de lui en courant. Aramis se retrouve trempé. Moi ? J’en profite pour rire aux éclats. Je n’oublie pas d’immortaliser sa tête avec quelques photos.