(raphael) a taste of something new

• thésée se détend un peu. il se laisse tomber doucement sur le lit pose sa tête sur l'oreiller et raph' comprend. raph' voit le gamin paumé. celui qui a l'air si petit dans un si grand lit. il y a un peu moins de peur dans ses yeux. et l'artiste comprend qu'au final, il doit agir avec lui comme il agirait avec sa sœur. sans désir sexuel. avec un peu de tendresse, mais juste ce qu'il faut. ils ne sont pas amis après tout. mais il ne peut pas s'empêcher de recouvrir le corps fin et mince de l'autre avec le draps. tout doucement. il lui sourit gentiment. « ne t'en fais pas. si je veux quoi que ce soit, je te demanderai. c'est la moindre des choses. et toi, si t'as faim, si t'as soif, ou même si tu veux prendre une douche, t'as pas besoin de me demander. dans le pire des cas, je serais dans la salle principale, avec les tableaux. je vais certainement dessiner un peu, je suis pas sûr d'avoir sommeil. et je rentre pas dans la chambre sans ta permission. tu peux dormir tranquille. » des fois il fait ça, avec sa sœur, parce qu'elle a peur de devoir se lever la nuit. parce qu'elle a peur que sa mère entre et lui crie dessus, encore et encore. alors, quand elle a peur comme ça, il s'assied au bord de son lit. il lui caresse les cheveux et lui dit qu'elle ne viendra plus, maman. qu'il ne la laissera pas entrer parce qu'il faut pas perturber le sommeil des princesses qui dorment. il lui dit qu'elle peut dormir tranquille, parce qu'il est là. et que si elle a peur, elle peut venir le voir. et que kuzco sera là pour la défendre si jamais quelqu'un entre dans la maison. et il continue de lui peigner les cheveux, avec ses doigts, jusqu'à ce qu'elle s'endorme.
• mais là, il ne fait pas ça, parce qu'il ne sait pas de quoi thésée peut bien avoir peur. alors, il se lève juste du lit. range la capote, le lubrifiant et le carnet à dessin dans sa table de nuit. il se rhabille un peu, et s'apprête à partir quand le brun lui demande son nom. alors, il lui répond doucement, en souriant un peu « raphaël. comme l'ange. » les anges gardiens, il a toujours trouvé ça complètement con comme idée. l'idée d'un truc mi-homme mi-piaf qui venait vous faire reculer, pour vous empêcher de traverser la route au feu rouge, qui regardait et surveillait le moindre de vos faits et gestes, se tapant le front contre le bureau, tellement ils en avaient marre de vos conneries. quoique ça, c'était plus drôle que complètement débile. il sourit encore un peu et ferme la porte derrière lui. il veut laisser au jeune homme un minimum d'intimité. il veut pouvoir le laisser dans sa bulle. il s'assied ensuite, par terre, là, au milieu de ses tableaux, en cours ou achevés, ses pinceaux étalés devant lui, et l'odeur de l'acrylique plein les narines. il soupire un peu et tente d'imaginer quel calvaire cela devait être,d'être touché en permanence par des mains inconnues. d'être vu juste comme une poupée bonne à satisfaire un plaisir immédiat. il essaie d'imaginer à quel point les relations charnelles devaient le dégoûter. mais ce n'était que de l'imagination. et il était encore très loin de la vérité. alors, prenant une clope d'un paquet plein de peinture qui traînait là, il l'allume et commence à mélanger ses couleurs. ça l'a inspiré, un peu. ce sera sombre, mais il ne voit pas comment il pourrait dessiner quelque chose qui respire la joie. c'est une femme, parce que c'est ce qu'il préfère peindre. une métisse, nue, les bras repliés autour d'elle, tentant de se protéger d'une obscurité grandissante autour d'elle. des mains ténébreuses qui lèchent son corps, qu'il rendra par des traits de peinture qui débordent. il construit le tableau dans sa tête, faisant jouer l'éclairage. il remonte ses manches et commence à peindre. il sait qu'il ne dormira pas, au final.
• il a enchaîné les cigarettes comme autant de filles dans son lit. il n'a pas cessé d'empoisonner ses poumons, entrouvrant la fenêtre de la pièce de temps à autre pour éviter de se retrouver asphyxié. le tableau a bien avancé. il fait une pause, le soleil est en train de se lever. la femme esquissée a trouvé quelques couleurs pour habiller sa peau. ses cheveux sont à demi-peints, s'évanouissant dans le néant de la toile blanche. ses mains recouvertes de peinture sont posées sur une tasse de café bien chaud et il contemple l'horizon, la mer, et le ciel qui se réchauffe peu à peu. la drogue a cessé de faire effet depuis un moment, mais il n'est pas en manque. pas encore, pas si tôt. il est en pleine descente, mais ça va. c'est cool. il est shooté au café et à l'inspiration. il est complètement perdu dans son monde intérieur, transporté par les vapeurs de la peinture et du fusain. il y a des tâches partout et il ne sait pas s'il pourra un jour faire disparaître celles sur sa chemise. mais c'est pas grave, il en a quelques unes, comme ça, qui crient, qui permettent de comprendre de loin qu'il est un artiste. il aime que les gens le sachent. il s'en fout de ce qu'ils peuvent bien penser de sa vie, de sa vie qui ne rime pas à grand chose ua final. mais il aime que les gens le regardent et se disent « tiens, celui-là, il fait de la peinture, c'est un artiste. il est amoureux de l'art, de l'éphémère rendu immortel. » il aime que les gens se posent des questions. est-ce qu'il est doué ? ça, oui. objectivement, sans prétention, il le sait. il sait qu'il a du talent. est-ce qu'il aime ce qu'il fait ou est-ce que c'est juste une manière de se rendre intéressant ? il aime ce qu'il fait plus que tout. il aime autant avoir un pinceau qu'avoir une femme entre les mains. mais il est sorti de ses réflexions par des pas discrets sur le carrelage. « salut, thésée. » il sourit. « tu veux un café ? »

Le lit est frais sous son corps presque nu. Thésée remonte un peu ses genoux, se retrouvant presque en position foetale. Il regarde le jeune homme se lever et s'approcher, puis recouvrir son corps avec le drap. Celui-ci entre en contact avec la peau de Thésée, et il frissonne juste un peu, avant de réussir à contrôler son corps. Alors il ajoute doucement que si le jeune homme veut quelque chose, si par hasard il revient à la réalité pendant la nuit, et il veut prendre ce pour quoi il paye, si il veut utiliser Thésée, alors il n'aura qu'à demander. Que ça ne servira à rien de venir et de se jeter sur lui, parce que de toute façon, il ne dira pas non. L'autre lâche le drap sur lui, délicatement. Il sourit. « ne t'en fais pas. si je veux quoi que ce soit, je te demanderai. c'est la moindre des choses. et toi, si t'as faim, si t'as soif, ou même si tu veux prendre une douche, t'as pas besoin de me demander. dans le pire des cas, je serais dans la salle principale, avec les tableaux. je vais certainement dessiner un peu, je suis pas sûr d'avoir sommeil. et je rentre pas dans la chambre sans ta permission. tu peux dormir tranquille. » il lui répond. Thésée le regarde un moment. Il ne sait pas ce qu'il a fait pour mériter ça, toute cette gentillesse. Il déteste presque la façon qu'il a de le traiter comme une victime, comme un animal blessé. Si Thésée n'était pas aussi fatigué, aussi désespéré, il serait parti ou aurait osé dire quelque chose. Il sait très bien qu'il est faible, il n'a pas besoin qu'on le lui rappelle comme ça. L'idée que ce soit si facile à voir, si simple à déceler, ça lui donne la chair de poule. Mais c'est un peu de gentillesse et d'attention, et Thésée en a terriblement besoin. Il prend, bien évidemment qu'il prend. Il n'ose pas répondre à ce sourire, il n'a pas assez confiance encore. Rien ne peut lui assurer que ce mec est sincère avec lui, mais qu'il le soit ou pas n'est pas la question. Thésée ne peut rien faire de toute manière. Même s'il mentait, Thésée resterait là. Il ne peut pas s'enfuir, il n'a pas le choix. Alors il choisit de lui faire confiance, d'y croire. Il se dit qu'il pourra passer une nuit au calme, sans être dérangé. Loin de Ben. Thésée regarde le jeune homme ranger la capote et le lubrifiant, et il ne sait pas si c'est bon ou mauvais signe. Si ça veut dire qu'il ne se passera rien ce soir, ou si ça signifie que quand il viendra plus tard, il ne s'en servira tout simplement pas et fera sans. Une fois de plus, Thésée ne sait pas et il ne peut pas savoir si fuir, alors il espère. L'autre se rhabille un peu, puis fait quelques pas. Il lui demande finalement son nom. Sans trop savoir pourquoi tout à coup ça l'intéresse, comment il a franchi la ligne qui le qualifie de client et qui lui interdit d'avoir un nom. « raphaël. comme l'ange. » il répond avec un petit sourire. Raphaël. Comme l'ange. Thésée n'y croit pas aux anges. Il se souvient de sa famille, à Paris, de ses parents d'adoption et de leur habitude d'aller à la messe tous les dimanches. Thésée n'avait pas de problème avec ça, il n'avait pas d'opinion, jusqu'au jour où un garçon de son lycée lui a dit que dieu détestait les gays. Et même après, avec le regard de sa mère quand il commençait à prendre confiance en lui, et tout le reste... Thésée a commencé à se dire que dieu devait vraiment détester les gays. Alors il a arrêté de trop compter sur dieu. Et puis il est arrivé à Biarritz, il a connu Ben, il a vite arrêté de croire aux anges. Mais s'il fallait y croire, et s'il pouvait se dire que Raphaël était son ange gardien, au moins juste pour ce soir... alors ça expliquerait tout un tas de choses. « okay » répond tout simplement Thésée, comme s'il acceptait ce prénom, comme si son avis avait été demandé. Thésée regarde Raphaël sortir, et fermer la porte derrière lui. Puis il est seul.

Il ne dort pas, ou en tous cas pas avant longtemps. Il est bien trop éveillé, trop effrayé pour se laisser aller. Thésée essaye d'écouter ce que fait Raphaël dans la pièce d'à côté, mais les bruits qu'il entend parfois sont discrets et il ne sait pas les identifier. Il garde les yeux fixés sur la porte un très long moment, s'attendant à chaque seconde que celle-ci s'ouvre et que Raphaël vienne profiter de ce qui lui est dû. Ca dure des heures. Et finalement, Raphaël ne vient pas, il ne se passe rien, et Thésée se calme petit à petit. Il se calme sans trop s'en rendre compte, et enfin, il arrive à fermer les yeux. Ses paupières tombent sous la fatigue, et il s'endort sans même réaliser. Lorsqu'il se réveille, il sait exactement où il est. Il n'y a pas de seconde de panique, durant laquelle il se demande pourquoi ça ne ressemble pas à sa chambre, comment il est arrivé ici, où il est, pourquoi. Non. Il ouvre les yeux et il sait déjà, il se souvient très bien. Il y a quelques rayons de lumière qui passent à travers les volets, et dans la pièce d'à côté, il entend le bruit discret de la vaisselle. Il attend, ne bouge pas, profite de ces draps. Il sait que dès qu'il sera levé, il ne retournera pas dans ce lit, alors il en profite autant qu'il peut. Il traîne longtemps, et enfin il se lève. Il est encore en boxer et il ne prend pas la peine d'enfiler ses vêtements. Thésée avance vers la porte, ses pieds glissants sur le sol froid. Il sort de la chambre et se dirige vers la cuisine. « salut, thésée. » fait Raphaël, avec un sourire. Thésée se mordille la lèvre, il ne sait pas quoi dire, n'ose pas sourire. « salut » il souffle simplement, d'une toute petite voix, alors que Raphaël enchaîne. « tu veux un café ? » Thésée hoche la tête. Il aime ça, le café, il adore même. « s'il te plaît » il ajoute même, sachant que la politesse, c'est important. Que quand il veut quelque chose, il doit demander poliment pour le mériter. Il ose s'approcher un peu plus du jeune homme. Il a de la peinture sur les mains, sur les vêtements, partout. Ca le rend un peu plus appréciable aux yeux de Thésée. Toutes ces éclaboussures, ça fait de lui quelqu'un, ça lui donne une âme. Maintenant, il a un prénom et de la peinture sur les doigts, et il est autre chose qu'une ombre faite de désirs et de pulsions. Thésée s'est déjà fait baiser par des "artistes" mais aucun d'eux n'avait de peinture sur le corps. Raphaël est différent. « T'es pas venu » il déclare, il constate, les sourcils un peu froncés, parce qu'il est confus. Thésée pensait qu'il viendrait, qu'il chercherait d'une façon ou d'une autre à de distraire avec le garçon qui dormait dans sa chambre. Maisnon, il avait visiblement passé la nuit à peindre. « Je comprends pas » il ajoute, la tête un peu penchée sur le côté, cherchant réellement à comprendre pourquoi Raphaël l'avait hébergé, pourquoi il n'était pas venu dans la chambre, pourquoi il avait fait tout ça.

• il est là, en effet. il te salue aussi. il a l'air si mince, si perdu, quand tu le regardes comme ça. tu refermes la fenêtre, histoire qu'il ne prenne pas froid. ce serait dommage. il accepte le café, et l'artiste sourit, se tournant, posant sa cigarette un instant dans le cendrier pour remplir une tasse et la faire réchauffer au micro-ondes. il fume beaucoup trop c'est une catastrophe. il va finir par se retrouver avec un cancer des poumons, et ça ne l'étonnerait même pas. mais il n'a pas spécialement envie d'arrêter. il aime un peu trop la sensation, l'odeur de la fumée, le goût du tabac sur sa langue et tout le reste. il passe sa main dans ses cheveux détachés et les ébouriffe un peu, avant de sortir la tasse presque brûlante de l'appareil et de la tendre à thésée. et le brun lui fait remarquer qu'il n'est pas venu le rejoindre. raph' est un peu étonné. il lui avait pourtant semblé qu'il avait précisé qu'ils ne feraient rien ? ce n'est pas une incompréhension chargée de reproches, au contraire. il ne voit justement pas pourquoi il serait allé dans la chambre. pour lui, il était clair qu'ils ne feraient rien, qu'il ne toucherait pas ce jeune homme. parce que ce n'était pas une bonne idée. ça n'avait jamais été une bonne idée. il savait qui il vouait. il la voulait elle. au moins, les choses n'étaient pas malsaines au point où il lui ressemblait, mais en version masculine. raphaël soupire et reprend sa cigarette. « je voulais, oui, au début, je voulais coucher avec toi. mais j'étais pas dans mon état normal, j'essayais... d'oublier une fille. c'est carrément cliché. puis je me suis rendu compte que c'était pas une bonne idée. que de toute façon, même si tu étais le type le plus génial au lit, je ne serais pas satisfait. parce que je la veux, elle. parce que, même si ça me fait beaucoup trop flipper, j'ai des sentiments pour cette fille. » et oh, que oui, ça lui fait peur de se dire qu'il a du mal à retrouver quelqu'un qui lui plaise un peu plus. de la voir partout das la foule. de l'attendre désespérément, de regarder son téléphone en espérant voir un message, un appel, quelque chose. ça lui était jamais arrivé, c'était toujours sur les autres que ça tombait. mais pas là.
• alors, il reprend, en s'asseyant sur le plan de travail de sa cuisine, continuant de fumer sa clope, un geste indissociable de sa personne. ses yeux se perdent un instant sur son tableau en cours. il le continue mentalement, pour voir la quantité de travail qu'il lui reste encore. « et puis.. -c'est pas de la pitié, hein- mais j'avais envie d'être gentil. de faire quelque chose de bien. d'aider quelqu'un, plutôt que de le briser. la seule personne avec qui je me plante pas, c'est ma petite sœur de dix ans. t'avais l'air paumé, et puis effrayé. j'avais pas envie de te faire peur. j'aime pas ça, d'ailleurs, que les gens soient effrayés à cause de moi. puis je me doute que tu t'es pas blessé tout seul, là. j'ai pensé que ça te ferait peut-être plaisir que quelqu'un soit un peu sympa avec toi et te plante pas des couteaux dans les flancs. » il ne comprend pas comment on peut être aussi violent avec quelqu'un. il ne voit vraiment pas thésée chercher les embrouilles, il n'y avait aucune raison de se montrer cruel sur lui. encore une manière de lui montrer qu'ils lui étaient supérieurs, qu'il ne valait rien, qu'on pouvait faire de lui ce qu'il voulait. finissant son café, l'artiste repose sa tasse sur le plan de travail, saute sur ses pieds, et récupère son matériel. il s'assied par terre, sur le carrelage gelé, et reprend son tableau. il n'aime pas tellement laisser ses œuvres en suspens, il a la bougeotte ensuite, il a besoin de les finir. juste ce détail, qu'il disait à sa mère, quand il était plus jeune. après je viens manger. il venait deux heures plus tard, en général. c'est quelque chose qui désespère loulah en général. mais pour ne pas la vexer, il vient manger, sans ronchonner. attrapant un pinceau lus fin, il s'attelle à donner un peu plus de vie au regard brun de la jeune femme. un regard terrorisé, celui d'une biche blessée. « tu es inspirant comme garçon. mais c'est étrange. je n'ai pas envie de te dessiner toi. ce sont les impressions que tu dégages qui sont inspirantes. »
• c'est un peu comme marlow, qu'il songe. il ne veut pas tout connaître, il ne veut pas en faire sa muse, il ne veut pas en faire sa chose, simplement le regarder comme ça, observer ses réactions, ses interactions avec le monde extérieur. et sa gestuelle et ce que ses yeux indiquent. c'est ça qui inspirent raphaël plus que simplement le corps du jeune homme, ou bien ses yeux. il n'attire pas tant l'homme que l'artiste. il y a une sorte de détresse et de rage qui se dégage de lui, parfois. mais là, il semble juste perdu dans une cuisine étrangère, trop froide et trop inconnue, aux placards maculés de petites tâches de peintures et d'empreintes de mains, sur certains. les poignées sont colorées, de mauve, de jaune, de marron, de vert, et de mélanges de couleurs qui s'écaillent un peu sur le métal. l'homme mélange ses couleurs sur sa palette, rajoute un peu de violet et appose la couleur rendue sur les lèvres pleines et charnues du sujet. il s'applique, ne faisant d'abord qu'un trait, et nuançant ensuite, avec différents outils. il est précis, il est concentré. il est passionné. mais il reste attentif à thésée. « tu voudras me dire combien coûte une nuit avec toi, après ? je t'avais dit que je te donnerais le double, et je vais le faire. comme ça, tu auras de quoi profiter un peu aussi. et puis comme je t'ai dit, si tu veux prendre une douche, n'hésites pas. la salle de bains est juste là. » il tend le bras, et pointe une porte du bout de son pinceau. il est gaucher, mais il sait aussi faire quelques petites choses de la main droite, en art. il s'humidifie les lèvres et se relève, pour changer l'eau du verre à moutarde qu'il trimbale toujours avec lui. il a l'impression de marcher de plus en plus doucement, comme si tous ses muscles étaient engourdis. il n'aime pas ça. sa bouche est sèche. il sait très bien ce que ça veut dire. il tâte ses poches du bout des doigts, et panique en ne sentant rien, oubliant qu'il avait changé de jean. il regarde près de la cafetière, derrière, autour de l'évier, ne trouve rien. ses mains tâtonnent. il sent ensuite la surface d'un sachet plastique, dans une corbeille à fruits, vide, et se détend. il plonge la main dedans et en resort deux cachets colorés. il se tourne et les avale tout rond. il n'aime pas que les gens le voient se droguer, il éprouve toujours un pincement coupable.

Quand Thésée entre dans la cuisine, Raphaël est là, il est couvert de peinture et ça lui donne un côté... rassurant. Il propose une tasse de café à Thésée, et il accepte. C'est rare qu'on lui propose un café. En fait, ça ne lui arrive jamais. Il n'est pas le gars auquel on propose le café, tout simplement. Il ne dit rien pendant que Raphaël met la tasse au micro-ondes, puis finalement, quand il se tourne et tend la tasse à Thésée, il fait sa remarque. Ses mains se ferment autour de la tasse, profitant un peu de la chaleur contre ses paumes, mais il est un peu trop paumé dans ses pensées pour remercier Raphaël ou même lui adresser un sourire. Il est juste confus. Il a du mal à comprendre, parce que même si Raphaël a été plus que gentil, c'était presque insensé qu'il se prive. Ca n'a aucun sens. Thésée croit peut-être à la gentillesse, mais là c'est assez extrême, parce que ce mec va payer comme il a promis qu'il le ferait, et ce sans même avoir profité un peu. Alors que Thésée aurait été prêt à le faire, vraiment. Ce n'est pas qu'il insistait, ou qu'il avait envie de se faire sauter mais... peut-être que ça aurait été plus simple et moins perturbant si les choses avaient été faites dans les règles. Enfin bref. Il regarde Raphaël reprendre sa cigarette en soupirant et Thésée a peur d'avoir dit une connerie, jusqu'à ce qu'il commence à répondre. « je voulais, oui, au début, je voulais coucher avec toi. mais j'étais pas dans mon état normal, j'essayais... d'oublier une fille. c'est carrément cliché. puis je me suis rendu compte que c'était pas une bonne idée. que de toute façon, même si tu étais le type le plus génial au lit, je ne serais pas satisfait. parce que je la veux, elle. parce que, même si ça me fait beaucoup trop flipper, j'ai des sentiments pour cette fille. » Il l'écoute attentivement. Thésée n'a pas trop d'expérience en ce qui concerne les sentiments. Il ne sait même pas vraiment comment ça fonctionne, tout ça. Ce qu'il sait, c'est que les sentiments qu'il a lui, il ne voudrait jamais les oublier. Le garçon qui l'intéresse, il ne veut jamais l'oublier. En fait, il a même peur de l'oublier, peur qu'il s'efface et que Thésée se retrouve tout seul et qu'il n'ait plus rien ni personne à qui se raccrocher. Plus de raison de se lever le matin, d'obéir à Ben, de continuer à faire son job toujours et encore juste parce que peut-être il le verra, lui, ce soir. Alors l'envie de se laver l'esprit, de se vider le cerveau comme ça, ça ne lui parle pas. Pourtant, il en a eu des clients qui passaient la nuit avec lui en hurlant le prénom de quelqu'un d'autre, qui étaient là pour essayer d'oublier ou peut-être pour se satisfaire en se disant que c'était avec cette autre personne, et pas avec Thésée. Il n'en sait rien, et il s'en fiche un peu, il essaye de ne pas y penser parce que ça n'a rien d'agréable. Il hoche un peu la tête, comme pour lui montrer qu'il comprend, que ok, c'est assez convainquant. Et Raphaël continue, après s'être assis sur le plan de travail. « et puis.. -c'est pas de la pitié, hein- mais j'avais envie d'être gentil. de faire quelque chose de bien. d'aider quelqu'un, plutôt que de le briser. la seule personne avec qui je me plante pas, c'est ma petite sœur de dix ans. t'avais l'air paumé, et puis effrayé. j'avais pas envie de te faire peur. j'aime pas ça, d'ailleurs, que les gens soient effrayés à cause de moi. puis je me doute que tu t'es pas blessé tout seul, là. j'ai pensé que ça te ferait peut-être plaisir que quelqu'un soit un peu sympa avec toi et te plante pas des couteaux dans les flancs. » Il plisse un peu les yeux, reste planté là à regarder ce mec qui fume sa clope en balançant des vérités très simples que pourtant Thésée ne voudrait pas admettre. Il veut prétendre que ça ne change rien pour lui, que ce que fait Raphaël n'a aucune importance, que s'il veut du sexe c'est bien et s'il n'en veut pas ce n'est pas mieux, il veut lui répondre qu'il n'a pas autant de pouvoir que ça sur lui. Qu'il n'est pas en position de briser ou non Thésée, de changer quelque chose. Il veut lui dire qu'il est juste un mec parmis tant d'autres et que ce qu'il fait n'a aucune influence sur lui. Il essaye même de se convaincre que ça n'a pas d'importance, que si Ben lui a fait ça, il y avait une raison tout simplement, et qu'il n'a pas à aller chercher plus loin. Se convaincre que non, ça ne lui fait pas plus plaisir que ça. Qu'il est juste indifférent à tout ça, à tout ce qui lui arrive. C'est plus facile comme ça, juste... se persuader qu'il est indifférent. Mais au final, tout ce qu'il dit, c'est un « J'suis pas effrayé » avec une petite mine boudeuse, comme pour sauver son honneur et sa fierté. Comme pour se défendre, parce que dans une autre situation, ça aurait pu être une attaque. Après ça, il regarde simplement Raphaël retourner à son tableau, et Thésée ne peut s'empêcher de le regarder se concentrer sur sa création. Il boit un peu de café, puis continue à l'observer. Sa voix le fait sursauter quand elle brise le silence. « tu es inspirant comme garçon. mais c'est étrange. je n'ai pas envie de te dessiner toi. ce sont les impressions que tu dégages qui sont inspirantes. » Thésée penche la tête sur le côté alors qu'il essaye de deviner s'il doit bien le prendre ou pas. Il ne sait pas, il n'est pas décidé, c'est bizarre. D'un côté, être inspirant, ça lui fait plaisir, même s'il ne sait pas exactement ce que ça veut dire. Mais si ce n'est pas lui personnellement qui est à l'origine de ces inspirations, alors il ne sait pas ce que sous-entend Raphaël. Peut-être que c'est la peur et le dégoût qui inspirent le jeune homme, peut-être que c'est tout ce qu'on voit quand on regarde Thésée. Ca l'angoisse tout à coup, de se dire qu'il n'est plus que ça, que le garçon qu'il est disparaît là-dessous. Il a bien conscience qu'il n'est plus tout à fait entier, qu'il n'a pas de passions, de talents, de centres d'intérêt, que tout ce qui le définit à présent c'est la peur et son corps et les choses qu'il sait faire avec ce corps et celui des autres. Au final, il ne dit rien. « tu voudras me dire combien coûte une nuit avec toi, après ? je t'avais dit que je te donnerais le double, et je vais le faire. comme ça, tu auras de quoi profiter un peu aussi. et puis comme je t'ai dit, si tu veux prendre une douche, n'hésites pas. la salle de bains est juste là. » dit Raphaël en désignant la porte de la salle de bain. Thésée tourne la tête dans la direction indiquée et se mord la lèvre. Non seulement Raphaël compte le payer pour une nuit dont il n'a pas profité, mais Thésée a presque oublié qu'il lui a promis le double. Il se dit qu'avec l'argent qu'il a en plus, peut-être qu'il pourra se payer une nuit de repos, la passer avec Alexandre, ou l'inviter au restaurant. Thésée ne sait pas encore, mais il a des dizaines d'idées et il essaye de ne pas trop penser à ce qu'il devra à Raphaël, une fois sorti de chez lui. « 200 euros » il répond simplement. Le prix d'une nuit, ce qui contentera Ben quand il rentrera ce matin. Après ça, il se dirige lentement vers la salle de bain, tourne la tête juste avant d'y entrer et aperçoit rapidement Raphaël qui avale des cachets. Il se mord la lèvre, et va prendre cette douche. Quand il sort, il remet son boxer parce qu'il n'a rien d'autre à porter, et il se sèche les cheveux comme il peut avec une serviette avant de les attacher en un petit chignon. Quand il sort de la salle de bain, il hésite un peu, il ne veut pas déranger Raphaël, le surprendre en train de faire quelque chose ou... il ne veut pas être l'intrus. Alors il passe juste la tête, puis sort lentement, prenant soin de laisser ses pieds glisser sur le sol en produisant un petit bruit pour avertir de sa présence. Son regard se pose encore sur le peintre et son oeuvre, et il repense à la conversation qu'ils ont eue dix minutes plus tôt. « C'est quoi les impressions que je dégage ? » il demande subitement sans trop réfléchir et en réalisant trop tard qu'il n'a peut-être pas le droit e demander, que la curiosité, c'est mal. Mais pourtant ça continue de lui trotter dans la tête depuis avant, alors il demande, juste comme ça.

• raph' le regarde partir à la douche, et se déconnecte de nouveau de la réalité, plongé dans le regard inachevé de la demoiselle sur sa toile. il ne sait quelle couleur appliquer. il a envie de la doter d'yeux verts félins. mais il se décide pour autre chose. un bleu turquoise, lumineux, presque phosphorescent. il mélange les couleurs et les applique doucement sur la toile, faisant tourner délicatement les poils du pinceau sur le support. il ajoute un peu de blanc à un endroit, change de pinceau, les lave, au fur et à mesure. il rend le regard un peu plus larmoyant. elle semble terrifiée. il laisse tomber la barrière émotionnelle, il se laisse emporter dans la terreur de la jeune femme. il se met à sa place. il laisse l'empathie prendre le dessus. il ne veut pas en faire un pathos. il veut juste que ce soit vrai. il veut montrer un état intérieur. pas le sien, non. lui il n'est qu'un moyen de communication. lui il est juste la ligne de câbles. il n'est ni la voix au bout du fil, ni l'interlocuteur. il n'a pas à interférer là dedans. il se mordille la lèvre, recule, s'avance. il oublie complètement où il est. il ne voit que son tableau, qui prend vie dans sa tête, qui se construit sous ses yeux. il ne sent plus que l'odeur étrange de la peinture, qu'il apprécie tant. il vaut mieux d'ailleurs, vu la quantité qu'il a respiré pour peindre la vague, qui s'est retrouvée encadrée et placée juste au-dessus de son canapé. au début, il trouvait que ce parfum si caractéristique était dégoûtant. il le trouvait douceâtre. et puis, il avait fini par s'y habituer, et maintenant, il avait le sourire aux lèvres en le reniflant dans l'air et cherchait d'où il provenait. et il était souvent déçu de se rendre compte qu'il s'était simplement fait des idées.
• il entend la douche se couper, mais cela ne le fait pas réagir. c'est en entendant le bruit des pas de thésée sur le carrelage qu'il relève la tête. il lui sourit doucement. il a fini par poser les pinceaux, et peindre les boucles folles de la jeune femme avec son index, pour leur donner un peu plus de volume. ça ne le dérange pas ce genre de choses. le brun lui pose une question, à laquelle il s'était préparé. il trouve la curiosité polie du jeune homme... agréable. comme s'il s'était tâté avant de poser la question, comme s'il n'était pas sûr d'en avoir vraiment le droit. raph' avait l'habitude qu'on le presse de questions, qu'on lui demande même s'il voulait qu'ils posent pour lui, s'il faisait dans le nu, si, selon le cliché de l'artiste peintre, il couchait avec tous ses modèles. et puis on commençait à critiquer, de façon constructive ou non, ses œuvres, on commençait à vouloir lui donner des conseils, dans le genre du 'moi, personnellement j'aurais fait comme ça'. il sourit et il réfléchit, son doigt plein de peinture se posant sur son menton, et y laissant une tâche colorée. « tu vois, y a plusieurs niveaux, chez toi -comme chez les autres d'ailleurs. mais chez toi faut creuser, pour découvrir ce qu'il y a au-dessous de la première couche : la sensualité. c'est clair que t'es beau , et c'est ce qui est beau que j'aime dessiner. mais ensuite, il y a cette espèce de lassitude, que j'ai représenté par la posture simplement défensive de la jeune femme. elle n'essaie pas de se défaire de ces mains aventureuses, elle essaie juste de les retenir. puis il y a de la tristesse, chez toi, aussi. ça va de pair avec la lassitude. ça, ce sont les larmes, mais t'es loin d'être bête, t'avais du le deviner. puis, la colère. la mine de la jeune femme, son expression, c'est ce qu'elle représente pour moi. et ensuite, l'attitude générale, c'est le dégoût. le dégoût d'être touchée par des gens dont le visage n'est pas important. mais t'en fais pas. c'est difficilement visible. j'ai juste l'habitude de décortiquer les gens avant de les dessiner. moi ce qui me plaît, c'est l'âme. l'enveloppe, elle plaît, certes, mais c'est pas ça qui m'intéresse quand je peins. » elle, c'était cette sorte de fragilité, de spontanéité, et cette impression qu'elle voulait s'effacer, s'évanouir, pour qu'il ne puisse plus poser son regard intrusif sur elle. il sourit doucement à thésée. et il réfléchit à comment lui devrait se peindre si jamais il faisait un auto-portrait. il n'en sait rien. les auto-portraits, ce n'est pas pour lui.

Thésée sort de la douche, et il hésite. Il n'ose pas vraiment sortir de la salle de bain, parce qu'une part de lui ne veut vraiment pas déranger. Ca fait partie de ce qu'on lui a appris. Etre discret, invisible, n'exister que pour les autres et lorsqu'ils ne veulent pas de toi, tu disparais. Alors Thésée ne veut pas perturber Raphaël dans son travail, alors que très clairement il n'a pas besoin de sa présence. Il hésite, et finalement, il sort très doucement, mais malgré tout il se fait entendre juste un peu pour ne pas le surprendre, pour ne pas qu'il pense que Thésée l'observe ou l'espionne ou quoique ce soit qui puisse lui passer par la tête. Au final, il se plante juste là et regarde très vaguement la toile, sans pour autant s'y attarder, parce que peut-être qu'il n'a pas le droit de regarder. Il ne sait pas trop ce qui se fait ou non, chez les artistes. Il ne connaît pas ces codes, mais il veut faire de son mieux. Peut-être que ça ne se fait pas de regarder l'oeuvre d'un peintre alors que celui-ci n'a pas terminé. Mais la phrase qu'a prononcé le jeune homme plus tôt lui revient, celle qui parle d'impressions, et c'est très intriguant. Finalement, Thésée pose la question. Ca fait sourire Raphaël, et Thésée le regarde encore, scrute son visage alors qu'il réfléchit. « tu vois, y a plusieurs niveaux, chez toi -comme chez les autres d'ailleurs. mais chez toi faut creuser, pour découvrir ce qu'il y a au-dessous de la première couche : la sensualité. c'est clair que t'es beau , et c'est ce qui est beau que j'aime dessiner. mais ensuite, il y a cette espèce de lassitude, que j'ai représenté par la posture simplement défensive de la jeune femme. elle n'essaie pas de se défaire de ces mains aventureuses, elle essaie juste de les retenir. puis il y a de la tristesse, chez toi, aussi. ça va de pair avec la lassitude. ça, ce sont les larmes, mais t'es loin d'être bête, t'avais du le deviner. puis, la colère. la mine de la jeune femme, son expression, c'est ce qu'elle représente pour moi. et ensuite, l'attitude générale, c'est le dégoût. le dégoût d'être touchée par des gens dont le visage n'est pas important. mais t'en fais pas. c'est difficilement visible. j'ai juste l'habitude de décortiquer les gens avant de les dessiner. moi ce qui me plaît, c'est l'âme. l'enveloppe, elle plaît, certes, mais c'est pas ça qui m'intéresse quand je peins. » Thésée écoute sans détourner le regard. En fait, il ne prend même pas le temps d'observer la toile alors qu'il fait référence à cette jeune femme de peinture. Tout ce qui dit Raphaël, ça le captive, ça l'intéresse. Thésée ne sait pas si le jeune homme a raison, il ne serait pas capable de le dire, il ne se connaît pas assez lui-même. Pourtant la lassitude, la tristesse, la colère, tout ça, ce ne sont pas des émotions difficiles à identifier, mais il a tellement de mal à mettre des mots sur ce qu'il ressent, sur ce qu'il est. C'est compliqué. Il a un état général, un état constant, mais il est incapable de mettre des mots dessus. Alors il fait confiance à Raphaël, il doit sûrement avoir raison. C'est rassurant, de pouvoir mettre des mots là-dessus, ça fait du bien. Un peu comme réussir après des mois de souffrance à identifier une maladie. Thésée hoche doucement la tête, et il s'autorise même un petit sourire, comme pour remercier le jeune homme d'avoir donné un peu de son temps et de son énergie pour le décortiquer ainsi et lui livrer ses propres secrets. Thésée reste planté là un moment, mais au final, il ne sait pas quoi dire après ça, il a juste besoin d'un peu de temps pour y réfléchir. Alors il retourne doucement dans la chambre et attrape ses vêtements, puis revient dans le salon où se trouve Raphaël. Il reste là un moment, avec sa boule de fringues dans les bras. « Je devrais partir » il dit, sans pour autant faire le moindre mouvement. « Sinon il va... » Thésée s'interrompt, laisse sa phrase se finir dans le vide, il reste là avec ses fringues en main. Il ne peut pas dire à voix haute ce que Ben ferait s'il rentrait trop tard, s'il se mettait à se poser des questions. « Se demander où j'suis » il termine, et sa gorge se serre juste un peu. C'est déjà arrivé une fois, il est rentré trop tard et Ben avait eu le temps de s'imaginer un tas de trucs, et Thésée avait du payer pour son erreur. Alors il commence lentement, à contre coeur, à enfiler son jean. Il n'a pas envie de partir, de retourner à la réalité. Après qu'on lui ait ainsi offert une nuit de repos et un café. Une douche et un peu de gentillesse. Il ne sait pas comment trouver la force de rentrer. Il ferme la braguette et le bouton. Thésée traîne, il prend plus de temps que nécessaire, se force presque à s'habiller lentement, très lentement. Il est plus ou moins en sécurité ici, il ne veut pas partir. Son t-shirt traîne par terre, avec ses chaussures, et lentement, il enfile une chaussette, puis l'autre. C'est idiot, de toute façon il va devoir partir et plus il traîne, plus il a de chances d'arriver en retard. Il joue avec le feu. « Il faut que j'y aille » il dit, et malgré le sens plutôt clair de la phrase, aucune détermination ne se ressent dans ses mots, comme s'il essayait plus de se convaincre qu'autre chose, alors qu'il reste là comme un idiot.

• raph' n'est pas idiot et il voit bien que thésée n'a pas envie d'y aller. qu'il le fait parce qu'il est contraint par ce mystérieux il. l'artiste n'aime pas ce genre de situations. il ne comprend pas comment on peut contraindre les gens, et surtout comment on peut rester sous la coupe de gens pareil. mais la vision de la blessure lui rappelle la réponse. on peut obliger quelqu'un à rester en le menaçant physiquement et psychologiquement s'il ne le fait pas. en le brisant de l'intérieur. c'est une nouvelle dimension, qu'il vient à peine de comprendre. et il sait qu'il est loin de se douter de tout. il ne fait qu'effleurer le problème, du bout des doigts. il est loin de s'en rapprocher. il le regarde se rhabiller, et il sait qu'il ne peut pas le retenir. il n'a pas envie de se sentir coupable, encore une fois, d'avoir blessé quelqu'un. même indirectement. il passe sa main dans ses cheveux, les enduisant un peu de peinture, sans le faire exprès. il faut qu'il trouve quelque chose, parce que le brun en face de lui est une personne vraiment très intéressante. qui mérite que quelqu'un fasse un peu plus attention à lui. il n'est pas qu'un corps, il est plus que ça. raphaël cherche une solution. une idée. quelque chose. « tu... tu peux revenir, tu sais. si je suis pas en soirée ou dans une boîte, je suis ici. » il réfléchit un instant, sur un moyen de le contacter. « tu as un téléphone ? une adresse mail ? quelque chose auquel ce « il » n'a pas accès ? si jamais ça va pas, ou si tu as juste besoin de dormir un peu. tranquillement. » parce qu'il sait qu'il ne le touchera pas. il a compris que ce n'est pas cela qu'il veut, mais c'est cette fille. il sait qu'il ne veut pas juste un plaisir charnel immédiat, mais quelque chose qui durera. mais ça lui fait encore peur. il n'est pas encore prêt. il regarde son tableau et se mordille la lèvre « tu pourrais poser pour moi, si le cœur t'en dit. habillé. je suis pas un de ces connards qui profite de son talent pour voir des gens nus, et en profiter ensuite. » ou du moins ce n'est pas ce qu'il veut faire avec thésée. il veut qu'il y aie une relation de confiance mutuelle. il veut être son ami. ce n'est plus ce qu'il veut faire.
• il se lève et essuie ses mains colorées sur son jean. ce n'est pas le même que celui qu'il avait pour aller en boîte. celui-ci tenait du jean ce que le 4x4 tenait de la voiture. il était résistant à tous les coups, tous les chocs, et avait vu toutes les couleurs existantes lui tomber dessus. il faisait part intégrante de l'atelier de l'artiste. il y avait des marques de feutre,de marqueur, de peinture et d'autres choses plus ou moins identifiables. la situation est nouvelle pour lui. il trouvait la compagnie de ce jeune homme... rassurante. apaisante. ça lui changeait de celle dont il s'entourait habituellement. sa sœur, ou ces filles qu'il mettait dans son lit. son pinceau toujours à la main, il ajouta distraitement un coup de peinture sur la toile, qu'il regretterait certainement après. il le regarde se rhabiller, avant de détourner le regard. il ne sait pas trop quoi dire, ni trop quoi faire. il a envie de le garder avec lui, discuter et prendre un café tranquillement. il a ce besoin d'aller vers les gens, vers le premier venu. c'est peut-être aussi à cause de la drogue. il a augmenté sa consommation, le temps passé à planer a diminué, depuis qu'il a compris que non, il ne va pas bien. que le fait de la chasser ne lui fait ps rien, comme il le pensait juste avant de le faire. il regarde dans le carnet, la première esquisse qu'il avait faite du jeune homme, avant de se rendre compte que ce dernier avait peur. il la plie soigneusement, lissant la pliure avec ses ongles. puis il la remet à thésée. « tiens. garde ça. c'est toi, ça te revient. ce serait glauque que je le garde sans ta permission. il est à toi. » il hausse les épaules avec un petit sourire, à la fois maladroit et gêné.

Il doit partir. Il aimerait bien rester, mais ça risque de devenir dangereux, c'est un peu comme tenter le diable. Il pourrait peut-être rester caché ici, ne jamais sortir de cet appartement. Mais il se doute bien que Raphaël ne serait jamais d'accord, et de toute façon, Ben finirait par le retrouver. Il serait prêt à fouiller tout Biarritz et le reste du monde pour retrouver Thésée. Pas parce qu'il lui manque, non. Peut-être parce que la vie serait plus compliqué sans lui pour ramener tout cet argent, peut-être parce que perdre sa principale source de revenus l'emmerderait vraiment. Mais surtout parce qu'il est fier, parce que Thésée lui appartient et il ne supporterait pas de le voir lui échapper. Alors il lui courrait après pour lui faire payer son erreur. Et Thésée préférerait être mort plutôt qu'avoir à vivre ça. C'est pourquoi il faut absolument qu'il se décide à bouger, sans tarder. Il a encore un peu de marge, mais la première étape, c'est remettre ses vêtements. Alors il le fait, lentement. Il enfile son t-shirt sous le regard du jeune homme. « tu... tu peux revenir, tu sais. si je suis pas en soirée ou dans une boîte, je suis ici. » Thésée hoche la tête, doucement, il ne sait pas si c'est prudent, si c'est une bonne idée. Il est peut-être complètement parano, mais il ne sait pas. L'idée de "tricher" comme il l'a fait ce soir, même si Ben ne l'apprendra jamais, ça l'effraye. « tu as un téléphone ? une adresse mail ? quelque chose auquel ce « il » n'a pas accès ? si jamais ça va pas, ou si tu as juste besoin de dormir un peu. tranquillement. » Il est gentil, ça fait plaisir, mais Thésée fait non de la tête. Pas de téléphone, rien. Mais l'idée de venir dormir ici, dans ce lit bien plus confortable que le sien, dans une chambre qui n'est pas une prison, ça lui donne un peu d'espoir. Ce ne devrait pas, il ne sait pas s'il pourra se le permettre un jour. Et même si Raphaël propose, Thésée ne veut pas être un poids, le pauvre gosse qui vient profiter sans rien donner en retour. « tu pourrais poser pour moi, si le cœur t'en dit. habillé. je suis pas un de ces connards qui profite de son talent pour voir des gens nus, et en profiter ensuite. » Thésée sourit un peu. Etrangement, ça lui plairait, d'être utile comme ça. Ca ne doit pas être trop compliqué de poser, il faut juste rester très calme et ne pas bouger, et suivre les indications. Thésée sait faire tout ça, il est même plutôt doué à ça. Il hoche un peu la tête. « Oui... Ok » il répond doucement. « J'aimerais bien » il ajoute encore avec un petit sourire, regardant Raphaël dans les yeux. Puis Thésée descend lentement son t-shirt sur son torse blessé, et il se baisse un peu pour remettre ses chaussures. Quand il se redresse, Raphaël est à quelques pas de lui, et il lui tend un papier plié en deux. « tiens. garde ça. c'est toi, ça te revient. ce serait glauque que je le garde sans ta permission. il est à toi. » Thésée regarde Raphaël un moment. Il a l'air un peu gêné, et Thésée n'ose pas vraiment. Puis, il tente, doucement, il tend la main et prend délicatement le dessins entre ses doigts. « Merci » il souffle, et il déplie le papier, juste pour regarder. Il ne peut pas juger, il ne sait pas si ça lui ressemble, il replie juste la feuille et sourit. Thésée espère arriver à le cacher quelque part, sous son matelas peut-être. Il ne voudrait pas que Ben tombe dessus, il se moquerait sans doute et s'amuserait à le déchirer. Ou alors il l'ignorerait simplement. Ca dépend de son humeur. De s'il s'ennuie ou non. Un Ben qui s'ennuie, c'est toujours mauvais signe. « J'espère qu'on se reverra » il avoue, replaçant une mèche de cheveux derrière son oreille. « T'es gentil » Ce n'est pas dans ses habitudes. Déjà, il en croise rarement, des gens gentils, et souvent, il les fuit. Parce qu'ils ne comprennent pas, parce qu'ils sont révoltés et pensent que c'est facile de se construire une vie, ils pensent qu'il suffit juste de s'en sortir. Ils veulent aider, trouver des solutions. Raphaël, il est différent. Il est tendre et généreux, mais il ne se mêle pas de ce qui ne le regarde pas. « J'espère que ça ira comme tu veux, avec cette fille » Thésée dit timidement, mais avec sincérité. Il n'y connaît peut-être pas grand-chose, à l'amour et tout ça, mais il a déjà ressenti des choses pour d'autres personnes. Alors il croise les doigts pour Raphaël, parce qu'il mérite que la vie soit gentille avec lui.

• le gamin secoue la tête quand raph' lui demande s'il a un moyen de le contacter qui n'est pas contrôlé par le type qui a mis thésée sur le trottoir. il se demande comment on peut en arriver à faire ça, à briser des gens, à les garder entièrement sous notre emprise, par des mensonges ou par la violence. il ne comprend pas comment on peut être mauvais à ce point. il déteste déjà la sensation d'être craint, alors pour lui, c'est impensable de s'en délecter et de chercher à provoquer pareille chose. mais il ne juge pas thésée, il ne le considère pas comme une pauvre victime, qui « ne s'en sort pas, parce qu'elle ne le veut pas ». il a très bien cerné que la situation était bien plus compliquée que ça pour le brun. et que ce n'était pas qu'une histoire de volonté. il lui dit qu'il aimerait bien poser pour lui, et l'artiste sourit. parce qu'il sait que certaines personnes trouvent du réconfort comme ça. parce qu'il sait que certains modèles sont apaisés lorsqu'ils ont fini de poser, comme s'ils avaient eu le temps de faire une séance de méditation. il en avait déjà discuté avec cette femme russe qui posait pour les étudiants en art. peut-être que ça pourrait faire du bien à ce jeune homme ? il l'espérait, en tout cas. et puis, de toute manière, ça lui redonnerait un peu d'oxygène, ça lui permettrait de passer quelques heures hors du contrôle de ce type. raphaël sourit en voyant le brun prendre le dessin. c'est bon signe. il espère qu'il pourra le garder. ça lui appartient, c'est juste à lui. c'est pour ça q'uil ne l'a pas signé. il ne veut pas laisser son empreinte, que ce soit sur son corps, ou bien sur la représentation de ce dernier. les autres le font bien assez. alors, il sourit un eu et hoche la tête, comme pour lui dire de rien.
• il lui dit qu'il est gentil, et raphaël ne peut pas s'empêcher de rougir. parce qu'il se dit qu'il a peut-être réussi à faire quelque chose de bien, aujourd'hui. et ça le rassure. il n'est pas devenu le connard dans la peau duquel il s'est glissé. il n'est pas devenu son rôle, il n'est pas devenu un simple bâtard qui cherche simplement des bras, quels qu'ils soient. il est encore capable de ressentir des choses, capable de vouloir quelqu'un, et uniquement cette personne, sans se contenter de génériques de personnes, comme les médicaments. non, il la veut elle, juste elle. et personne d'autre. et ça le rassure. il est encore quelqu'un d'à peu près correct, d'à peu près humain. lui aussi, il espère qu'il reverra thésée, parce que ce gars est quelqu'un de bien, aussi. quelqu'un de gentil. et d'inspirant. il a envie de l'aider, à son niveau, en lui laissant la réserve qu'il désire garder. il a envoie de faire quelque chose pour lui sans s'immiscer là où il ne devrait pas. le brun lui dit qu'il espère que tout se passera bien avec elle, et, sous-entendu, qu'il finira avec elle. l'artiste sourit un peu. il ne sait pas s'il le mérite pour le moment, s'il ne doit pas continuer de s'améliorer. il ne croit pas à ce système de péché, de vie débauchée. il pense plutôt que s'il la veut, il doit se montrer digne de confiance. il doit montrer qu'il est prêt à l'accueillir dans sa vie, et qu'elle ne sera pas un nom de plus à la liste de celles qui ont passé un temps relativement court dans ses bras. alors, il sourit, et sort quatre cent euros, de ce qui lui sert en quelque sorte de tirelire. il les lui donne et le raccompagne jusqu'à la porte. « fais-en bon usage. lui donne pas tout, il mérite pas d'avoir un gars aussi bien que toi sous ses ordres. » et il referme doucement la porte, le cœur lourd de le laisser entre les mains d'un tel monstre. mais il ne peut rien faire sans l'accord de thésée, et ils ne sont pas assez proches pour que le brun le lui donne, ce qu'il comprend parfaitement.