i'm sorry ? (ade)

Les journées sont affreusement longues, quelque part, t'es content quand tu dois aller à la rééducation. même si ça te fait mal, même si tu souffres souvent pendant ces séances, au moins, ça t'occupe, au moins, ça te permet de ne pas trop tourner comme un lion en cage, au moins, t'arrive à sortir la tête de l'eau, ou presque. parce que dès que tu retrouves l'ambiance de ta chambre, tu pourrais te tirer une balle dans la tête, aussi simplement que c'est dit; alors tu fais mine de rien, tu restes muet discret. t'appelles jamais les infirmières, tu les remercies vite fait quand elles t'apportent à manger. le temps est long et la télévision disponible dans ta chambre totalement inintéressante. les soirées entre potes te manquent. les soirées à regarder les vagues te manquent. les soirées de rush au restaurant te manquent aussi; tout te manque et tu ne peux avoir accès à rien. en même temps, si tu avais osé le dire, que tu étais, là, si tu avais laissé échapper que tu étais là, peut-être que tu aurais eu de la compagnie, peut-être que le temps aurait été beaucoup moins long. quelque chose comme ça. tu restes là, les yeux à moitié fermés quand tu entends frapper à ta porte. tu te redresses doucement tu regardes l'heure. tu sais pas qui c'est. c'est pas l'heure du repas, alors t'en sais trop rien. entrez ? que tu dis, simplement, tu restes là, devant, tu regardes la porte s'ouvrir et tu la vois. C'est pas possible non. pas elle. comment a-t-elle su ? merde, Ade ? mais .. qu'est-ce que tu fiches ici au juste ? tu la regardes, choqué de la voir là, ta petite soeur.

Ade sortait tranquillement du lycée et attrapa son portable pour écouter le message vocal qu'elle avait reçu"Salut Ade c'est Julien... Écoute, je viens d'apprendre pour ton frère tout à l'heure à l'hôpital, je suis vraiment désolé pour son amputation... Tu m'avais dit qu'il adorait surfer... C'est vraiment dommage..." La lycéenne n'écoutait plus ce qui venait après... Était-ce un canular ? Non quel genre de mec pourrait faire une blague pareille ? Numa amputé ? Les mains de la petite Favre tremblaient, elle devait à tout prix voir son grand frère, être rassuré, avoir mal comprit ce n'était peut être pas une amputation mais juste une opération et ce con de Julien aurait confondu...
La jeune fille attrapa le premier bus qui s'arrêtait à l'hôpital, elle était terriblement nerveuse à l'idée que ce soit vrai, à l'idée que son frère soit allongé sur un lit avec un membre en moins, sa jambe. L'adolescente passa la durée entière du trajet à chercher des infos sur les nouvelles prothèses qu'il y avait.
Après avoir demandé la chambre à l'accueil, Ade se dirigea vers la chambre de son frère le cœur dans la gorge. C'est en tremblant qu'elle frappa à la porte. Elle entendit sa voix l'autorisant à entrer et quand elle poussa la porte et vit que c'était vrai, elle eut les larmes aux yeux. "Putain Numa à ton avis ?" Ade s'approche du lit, elle avait envie de le prendre dans ses bras, mais aussi de le frapper. "Depuis quand ?"

Elle est là, elle entre et elle a les larmes aux yeux ta petite soeur. t'aimerais lui demander qu'elle ne pleur pas, qu'elle ne s'inquiète pas, mais tu ne sais pas comment faire, tu n'as pas les mots, tu attends, tu la laisses entrer, prendre le temps de s'approcher de ton lit dans lequel t'es complètement bloqué.  "Putain Numa à ton avis ? Depuis quand ?" qu'elle demande rapidement et toi, tu bloques ton regard sur elle. comment est-ce qu'elle a su que tu étais là ? je voulais pas que tu le saches Ade, je voulais pas que vous le sachiez tous .. comment tu l'as su au juste ? tu te demandes, qui a bien pu lui dire, lui parler, lui faire comprendre, il y avait forcément quelqu'un qui avait lâché la chose alors tu te demandes. je ne suis pas partie en vacance Ade, j'ai trouvé que ça comme excuse pour que personne ne s'inquiète de mon absence .. j'suis désolé Ade mais tu devrais peut-être partir non ? t'as pas envie de voir ça à mon avis, j'suis pas en état de faire quoique ce soit, ni même de me battre avec toi. surtout pas me battre avec toi.  tu lui réponds, calmement, bien trop calmement, c'est vrai, t'as pas la foi pour te battre, pour prouver que tu as raison, t'as juste besoin d'un être un peu seul. donc si t'es là pour gueuler, fais demi-tour Ade.  

L'adolescente regardait son frère les larmes roulant sur ses joues bronzées alors qu'elle s'approchait du lit. Elle lui en voulait et en même temps non, car elle pouvait très bien comprendre à quel point il pouvait être mal en ce moment.   "Tu comptais le cacher encore longtemps ? Tu nous aurais laissés pour que jamais on ne l'apprenne ?" C'était égoïste de lui reprocher tout ça, mais elle était en colère, non pas contre lui, mais contre ceux qui l'avait laissé endurer ça tout seul. Ade s'installa à moitié sur le lit, une fesse dans le vide. "Un gars que je connais qui travaille ici, il a vu ton dossier et m'a appelé pour dire qu'il était désolé et tout... Il supposait que j'étais au courant" Elle souffla et prit sa main dans la sienne pour nouer leurs doigts "Je reste, je ne suis pas là pour me battre ni pour te crier dessus Numa, je suis là pour toi... Je t'aime gros nul" la jeune fille adressa un léger sourire à son frère avant d'essuer ses larmes avec la main qui lui restait. Il était hors de question qu'elle s'en aille maintenant, Numa était son grand frère, l'un de ses héros, elle ne pouvait pas le laisser même s'il lui demandait.

tu vois les larmes rouler sur ses joues et tu t'en veux maintenant. tu t'en veux parce que tu lui fais du mal et tu ne veux pas lui faire de mal. ni à elle, ni aux autres. elle est douce ade, elle mérite le meilleur pas de pleurer pour son frère, à cause de son frère. elle s'approche et vient s'asseoir sur ton lit d'hôpital. "Tu comptais le cacher encore longtemps ? Tu nous aurais laissés pour que jamais on ne l'apprenne ?" qu'elle s'énerve et tu peux comprendre, même si c'est ta vie, ton frère et tes soeurs, c'est toute ta vie aussi. ils compte plus que n'importe qui dans ce bas monde. Ade ... tu murmures doucement, tu ne sais pas quoi lui répondre, tu ne voulais simplement pas leur faire endurer tout ça. tu voulais les préserver, simplement.  Un gars que je connais qui travaille ici, il a vu ton dossier et m'a appelé pour dire qu'il était désolé et tout... Il supposait que j'étais au courant. Je reste, je ne suis pas là pour me battre ni pour te crier dessus Numa, je suis là pour toi... Je t'aime gros nul elle prend sa main dans la tienne, et de l'autre essuie ses larmes. toi aussi, t'as envie de pleurer, mais tu te retiens, tu dois être fort pour ta petite soeur, c'est important alors tu ne pleurs pas non. tu finis par te décaler comme tu peux pour finalement la soulever avec tes mains et venir la poser contre ton torse. tu la prends dans tes bras et tu respires son odeur si apaisante, l'odeur de la maison. merci Ade ... merci de ..   tu comences tu termines pas, un sanglot t'échappe, tu respires pour te calmer, lentement. je vous l'aurai dit tu sais, j'aurai attendu d'accepter moi-même d'abord, d'accepter cette putain de situation ... au moins ça. là, c'est encore trop tôt. ne m'en veux pas trop longtemps.   tu caresses doucement sa chevelure, tu chasses ses larmes, avec tendresse. j'avais beaucoup trop mal à ma jambe pour continuer à vivre ainsi. j'ai repoussé l'opération, depuis un an, je la repousse et  ... et voilà. tu conclus, finalement.

Ade pleurait doucement contre le torse de son grand frère, au fond elle n'était encore qu'une petite fille avec des rêves pleins la tête alors voir ceux de son frère s'effondrer c'était tellement horrible, elle l'aimait si fort son grand frère, son Numa.   "j't'en veux pas Numa... j'ai vu qu'un gars arrivait toujours à surfer avec une prothèse, tu pourrais avoir ça aussi n'est-ce pas ? " L'adolescente leva les yeux vers son frère qui pleurait lui aussi, c'était tellement dur de voir des larmes dans ses yeux qu'elle baissa les siens, la gorge serrée elle frotta avec douceur le bras de son grand frère pendant quelques minutes en silence. "Il faudrait en parler à papa et maman, ils t'aideront aussi..." La jeune fille lui adressa un léger sourire et se redressa un peu pour toucher son moignon. "Tu as mal ? " Si jamais un jour ça devait lui arriver à elle, elle ne supporterait pas, on peu difficilement danser avec une seule jambe... Mais elle devait être forte pour lui, l'aider à avancer et à accepter. "Tu reste encore combien de temps ici ? On devrait faire un peu de déco ici..." C'était tristement blanc dans cette chambre, elle pouvait ramener quelques plantes, des posters, des photos, des choses qui lui rappellerait la maison.

"j't'en veux pas Numa... j'ai vu qu'un gars arrivait toujours à surfer avec une prothèse, tu pourrais avoir ça aussi n'est-ce pas ?" tu secoues la tête, tu ne veux pas penser à ça, pas encore, t'as même pas encore accepter le fait que tu n'avais qu'une seule jambe, alors ... parler de prothèse, parler de ce que tu pourrais faire dans quelques années ? non, t'as pas envie d'avoir de l'espoir, t'as pas envie qu'il soit faux surtout. j'y pense pas encore, à tout ça, j'peux pas encore y penser. tu ne lui caches pas, t'as pas de raison de lui cacher. "Il faudrait en parler à papa et maman, ils t'aideront aussi.." tu secoues une nouvelle fois la tête. écoute Ade, non, tu n'en parles pas d'accord. ni papa, ni maman, ni personne. tu entends ? "Tu as mal ? et elle te touche juste là; tu ne bouges pas. oui, j'ai mal. souvent, quand les médicaments ne font plus effet, j'ai mal. tu lui dis, tu lui expliques doucement. Tu reste encore combien de temps ici ? On devrait faire un peu de déco ici... qu'elle rajoute en regardant ta chambre bien ... bien triste, sans vie, un peu comme toi, elle te correspond finalement, quelque part. j'vais rester là pour quelques mois, un ou deux, je ne sais pas tellement.

Ade ferma les yeux, comme pour échapper à tout ça pendant quelques secondes et juste simplement profiter d'être dans les bras de son grand frère. Une, deux, trois secondes et elle les ouvrit pour faire face à la réalité, c'était à elle de prendre soin de lui maintenant. Elle acceptait ses refus, le fait de parler de l'avenir et de prévenir leurs parents, elle se tairait pour lui, bien qu'elle sût très bien que ça ne pouvait pas durer. Un jour ou l'autre, il devra leur dire et accepter de l'aide. Quand Numa lui affirma qu'il avait mal elle retira ses doigts rapidement et se serra un peu plus contre lui en essayant d'éviter de fondre en larmes. "C'est trop triste ici... Tu ne veux pas que je te peigne quelque chose ?" Elle pensa immédiatement à peindre la plage, sa préférée, mais ce n'était peut-être pas une bonne idée, elle ne voulait pas lui faire plus de mal, elle voulait juste apporter un peu de couleur dans cette horrible chambre où il devra rester pendant des mois. "C'est long... Je te promets de venir souvent" Elle mentirait à leurs parents s'il le fallait, car il était inconcevable pour elle de laisser son Numa tout seul. "Je ne peux le dire à personne alors ? " Bien que Ade comprenne tout ça, elle angoissait un peu de devoir garder ça pour elle, ne rien dire à ses autres frères et sœurs serait très difficile, mais si c'était ce que Numa voulait, elle ne le trahirait pas.

elle retire presque immédiatement ses doigts quand tu lui annonces que tu as mal. tu souris doucement, tu as mal, oui, mais pas au contact, pas lorsqu'on te touche, pas de cette manière, c'est uen douleur qui est cependant indescriptible. tu souffres autant intérieurement qu'extérieurement. c'est étrange, déstabilisant. C'est trop triste ici... Tu ne veux pas que je te peigne quelque chose ? qu'elle demande finalement, tu caresses tendrement ses cheveux. sa présence est rassurante, presque apaisante, puis avec ade, tu gardes ta mauvaise humeur pour toi, tu ne veux pas lui faire de mal, non, absolument pas, ton but est de la protéger ta petite princesse, alors c'est ce que tu fais. tu la protèges du mieux que tu peux en la gardant contre toi. tu seras en colère plus tard, contre les infirmières par exemple. si tu es inspirée, si, bien sûr, tu as du boulot, y'a pas mal de mur blanc là. tu lui dis, qu'elle se fasse plaisir, simplement, quoiqu'elle t'apporte, tu seras content, tu ne feras pas ton difficile, enfin, tu feras ce que tu peux. C'est long... Je te promets de venir souvent. Je ne peux le dire à personne alors ? tu secoues la tête, tu embrasses son front. j'veux pas que tu arrêtes ta vie pour moi ade, tu vis ta vie, tu viens quand tu peux, tu sais, j'vais être assez con si je m'y mets, et j'veux pas te faire du mal. pour ce qui est prévenir les autres .. je t'avoue que je prendrai mon temps, pour les prévenir, j'veux pas voir la pitié ou quoique ce soit. je le ferai, mais pour le moment, si tu peux le garder pour toi, ça m'arrange énormément.